Interview Ghislain Gomart Directeur Général EXPOFRANCE 2025

Interview Ghislain Gomart Directeur Général EXPOFRANCE 2025

Avenue de l’Opéra, l’adresse est prestigieuse. L’immeuble d’affaires, à côté de l’office du tourisme de Paris, est cossu. Mais c’est dans un tout petit bureau que phosphore l’équipe opérationnelle (3 personnes) pour la candidature de la France à l’organisation d’une exposition universelle en 2025. J’y rencontre Ghislain Gomart, directeur général d’EXPOFRANCE 2025.

Propos recueillis par Eric Watiez pour la Gazette des Salons

La cinquantaine dynamique et rigoureuse, Ghislain Gomart a un parcours particulièrement diversifié. St Cyrien, il effectue deux mandats au FINUL et participe à la première guerre du Golfe.

Il « change son fusil d’épaule », passe par l’ENA, s’ouvre successivement les portes d’un conseil général, de la fondation Nicolas Hulot, de cabinets ministériels (A. Juppé, JL Borloo) et même du bureau du premier ministre mauricien comme haut fonctionnaire délégué.

Envieux de la chance qu’avaient eue les équipes chargées de mettre en place les candidatures françaises à de grands événements précédents, il s’est positionné dès qu’il a eu vent du projet EXPOFRANCE 2025. Bien lui en a pris, il est aujourd’hui à la tête opérationnelle du projet d’organisation depuis septembre 2012.

Sa passion du projet et son enthousiasme à en parler sont particulièrement communicatifs…

L’IDEE D’UNE CANDIDATURE DE 2008 A AUJOURD’HUI

Dans un premier entretien, Ghislain Gomart nous fait part des réflexions ayant fait germer l’idée d’un projet d’exposition universelle pour la France et du contour intellectuel actuel de ce projet.

EW. Comment est née l’idée de l’exposition universelle en France en 2025 ?

GG. C’est Jean-Christophe Fromantin, député-maire de Neuilly, qui a eu cette idée. Il partait du principe que le France avait besoin d’un grand événement mobilisateur pour réconcilier les français avec la mondialisation, pour leur faire retrouver leur confiance et rebooster leur moral, pour relancer l’économie du pays, pour que la France se réinvente dans la mondialisation, qu’elle cesse de croire qu’elle n’a que le passé à offrir et pas d’avenir à proposer à sa jeunesse…

Pour toutes ces choses, il arrive à la conclusion que l’Exposition Universelle est le meilleur outil.

Dès 2008-2009, les prémices se mettent en place. L’axe majeur du Grand Paris, qui va de la Défense aux Tuileries sur 7 km en ligne droite, et qui ne sera jamais enfoui pour des questions de coûts, est pressenti par Jean-Christophe Fromantin pour former la colonne vertébrale du projet. L’idée d’une exposition internationale et culturelle où tous les musées du monde viendraient s’exposer de part et d’autre du tracé germe. C’est le point de départ de l’affaire ; en 2011 sort le premier article sur cette idée d’une exposition majeure. Le concept a entre temps évolué.

EW. Et pourquoi ne pas organiser des Jeux olympiques ?

GG. En parallèle, diverses personnalités émettent l’idée d’une candidature de la France aux Jeux Olympiques de l’été 2024 ou 2028. JC Fromantin fait valoir que les Jeux olympiques sont très enserrés dans des règlements stricts édictés par le CIO qui choisit les partenaires, les disciplines, les plannings, etc., cadre qui offre donc peu d’espace aux avantages comparatifs d’un pays à l’autre. L’exposition universelle, quant à elle, offre beaucoup plus de libertés et permet de mettre en avant les avantages du pays d’accueil. De ce point de vue, la France a des atouts incomparables, comme la richesse de son patrimoine, la diversité de ses territoires, ses innovations. JC Fromantin est persuadé de la justesse de sa réflexion.

Ceci dit, nous n’opposons pas les deux projets, Jeux olympiques en 2024 et Exposition universelle en 2025 ne sont pas incompatibles.

EW. Vous me parlez beaucoup de JC Fromantin, à l’initiative du projet… Et vous, quand êtes-vous intervenu ?

GG. En 2002, j’étais cadre dirigeant dans une entreprise de logistique à Nantes et j’entendais parler de gens qui travaillaient sur l’idée d’une candidature de la France aux Jeux Olympiques de 2012, idée qui est devenue une réalité en 2003 pour une candidature, mais qui a été perdue en 2005 comme chacun sait. J’avais trouvé que ceux qui étaient au départ d’une aventure comme celle-là avaient beaucoup de chance. Il était formidable pour moi de partir d’un petit groupe de personnes, d’une réflexion, d’une idée, d’un projet…

Terminant ma mission auprès du gouvernement mauricien au printemps 2012, j’ai lu une tribune de JC Fromantin dans le Figaro à propos d’une candidature éventuelle de la France à une Exposition Universelle. J’ai trouvé que c’était un excellent projet et je suis allé voir JC Fromantin, que j’avais déjà rencontré à quelques reprises dans ses missions d’engagement personnel, pour lui faire part de mon envie de collaborer à son projet.

EW. Comment l’idée suit-elle son chemin ensuite ?

GG. JC Fromantin poursuit sa démarche et consulte. En mars 2012, un premier point presse est organisé au Grand Palais.

Quelques mois plus tard, je rentre dans le projet pour le structurer, mettre en œuvre les aspects opérationnels, créer une association, un cadre juridique, mettre en place une équipe, avoir un bureau, trouver des partenaires… passer donc à la phase offensive du projet. Les statuts de l’association EXPOFRANCE 2025 sont déposés en décembre 2012.
Cette association s’inscrit très clairement dans une perspective de développement durable et elle est reconnue d’intérêt général en août 2013, ce qui permet aujourd’hui de travailler dans le cadre du mécénat d’entreprise et d’obtenir un peu plus aisément des financements privés, unique source de financement.

L’objet de l’association est de susciter l’engouement autour de ce projet et d’accompagner celui-ci jusqu’à la candidature officielle de la France, et bien entendu après.

EW. Vous parlez de la France, ainsi la candidature de Paris à l’Exposition Universelle est formulée par la France, et non par la Mairie de Paris ?

GG. La règle est que la candidature d’une ville ou d’une région soit déposée par un Etat. Notre projet se dénomme EXPOFRANCE 2025 et non ExpoParis 2025, bien que Paris sera au cœur de l’exposition, mais nous voulons que l’ensemble des territoires se mobilisent pour ce projet, qu’ils s’y impliquent et qui accueillent également le monde en 2025.

Nous imaginons en effet un concept géographique de l’exposition selon trois cercles concentriques. Un cercle périphérique constitué des différentes métropoles régionales (Strasbourg, Marseille, Toulouse, Nantes…) qui, en 2025, seront reliées au cœur de Paris en moins de deux heures et seront alors autant de points d’entrée dans l’exposition ; cette extension est l’une des originalités de notre projet, qui nous permet de nous affranchir des modalités classiques des expositions universelles habituellement établies en champ clos sur un site unique.

EW. Ce principe est-il inédit en matière d’expositions universelles ?

GG. Il est totalement inédit, voire même vraisemblablement un peu provocateur à ce stade. Mais nous n’oublierons jamais qu’il nous faudra convaincre les 168 Etats membres du BEI – qui disposeront chacun d’une voix lors de la sélection en 2018 – que c’est l’offre française, pour originale qu’elle soit, qui leur permettra de se présenter au monde dans les meilleures conditions.

Le 2ème cercle concentrique est le Grand Paris, aujourd’hui principalement axé sur la thématique « transport » via le « Grand Paris express » et ses 72 nouvelles gares. D’autres notions, comme la « gouvernance » et la délimitation territoriale font aujourd’hui partie de la réflexion sur le Grand Paris. Il n’est pas de notre ressort de définir ce qu’il en sera à l’horizon 2025. Ce que nous souhaitons est que le Grand Paris trouve dans l’Exposition Universelle sa dimension culturelle et humaine auprès des franciliens, des français en général et du monde entier. Au-delà de la ville de Paris, c’est le Grand Paris, tel qu’il sera à l’horizon 2025, qui portera une part importante de l’exposition.

EW. Vous parliez de trois cercles définissant l’exposition, quel est le troisième ?

GG. Effectivement, et pour resserrer le dispositif, le 3ème cercle concentrique, dans lequel l’exposition serait sans doute plus dense et permanente, pourrait être le Paris des Expositions Universelles passées, de la gare d’Orsay aux Invalides, du Champ de Mars à la montagne de Chaillot et, jusqu’au quartier d’affaires de la Défense d’un côté , à la Concorde de l’autre. Cette aire serait le noyau central de l’Exposition Universelle.

On pourrait imaginer que des navettes TGV venant des métropoles partenaires de l’exposition assureraient la liaison entre les différents sites métropolitains de l’exposition. Ainsi nous serions toujours dans l’exposition universelle durant les temps de transport, le tout assurant l’unité de lieu de l’exposition dans le cadre des mobilités du XXème siècle.
En conclusion nous travaillons sur une unité d’exposition universelle en lien avec une diversité des territoires.

EW. Merci monsieur Gomart de nous avoir rapidement fait vivre la genèse du projet actuel d’EXPOFRANCE 2025.

La suite de cet entretien permettra d’en savoir plus sur le déroulement de la candidature, les partenaires et les actions déjà engagées. A suivre dans la Gazette des Salons.

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